Laisser circuler les poissons, limiter les inondations, valoriser le patrimoine (Article de la Gazette de la Manche – 6 janvier 2010)
Saint-James rend sa liberté au Beuvron.
L’ère industrielle au lieu-dit Les Rochers, dans le bas de Saint-James en direction de Saint-Hilaire-du-Harcouët, est révolue.
L’ancienne usine des Tricots Saint-James a fermé ses portes depuis quelques années. Son démantèlement a débuté en début de semaine. Le Beuvron va retrouver sa liberté. Les Saint-Jamais vont bénéficier, dès la fin de l’année, d’un cadre renaturé avec vue imprenable sur l’église, le château et les remparts. Plus d’un million d’euros sont investis dans ce projet qui doit être pilote.
Le Beuvron, affluent de la Sélune, a été dérouté de son lit originel pour alimenter un bief. Un seuil lui barrait le passage, le détournant vers ce canal de dérivation qui alimentait l’usine de tricots en électricité.
L’usine fermée, ce bief n’a plus de raison d’être, d’autant que l’angle droit qui le compose empêche la remontée des poissons migrateurs. Et " le passage du cours d’eau sous l’ancienne usine occasionne des inondations des bâtiments vétustes et favorise la porosité des murs ", explique Magalie Robidel, chargée de mission environnement à la communauté de communes de Saint-James. Or, la Directive-cadre sur l’eau, édictée par l’Union européenne, impose aux collectivités, " d’atteindre un bon état écologique de toutes les eaux et des milieux aquatiques d’ici 2015 ".
Le Sage de la Sélune a mené, dès 2005, une étude hydraulique. Plusieurs scénarii ont été établis. La solution retenue est la suppression de ce seuil et de l’alimentation en eau du bief et la déconstruction de l’usine. Propriétaire de ces deux ouvrages, la communauté de communes a fait appel au cabinet de génie civil et d’hydraulique rennais, Safege, et aux Ateliers du Marais de Fougères, pour l’aménagement paysager. Tous deux ont dessiné le réaménagement en prenant en compte la donne écologique (la circulation des poissons), la limitation du risque d’inondation, mais aussi la mise en valeur du patrimoine industriel et paysager.
" Garder la mémoire des lieux "
Dès lundi, la dépollution de l’ancienne usine a démarré.
L’entreprise sera ensuite " grignotée " par un grappin. Quatre mois de travaux sont prévus pour cette seule phase. Ce chantier est confié au spécialiste en la matière, Séché Ecoservices.
Amiante, plomb… seront transférés vers les décharges appropriées, à Laval. Les déchets non toxiques resteront sur place et serviront au remblai du parking qui sera créé derrière l’ancienne filature.
Au titre du patrimoine industriel, " pour garder la mémoire des lieux ", les murs de ce bâtiment seront conservés. "L’intérieur sera paysagé, détaille Magalie Robidel, et offrira une vue imprenable sur les remparts Guillaume le Conquérant, sur le château de la Paluelle et sur l’église Saint-Jacques ". Saint-James offrira un nouveau coup d’œil à ses visiteurs qui arriveront par la route bucolique de Saint-Hilaire. La friche industrielle sera métamorphosée en espace vert, dédié aux loisirs et à la détente.
L’usine cédera sa place à une vaste prairie inondable, surplombée de pontons de bois et de deux observatoires. Le Beuvron qui passait dessous sera remis à ciel ouvert. Une chute d’eau sera aménagée à l’emplacement de la roue du moulin.
Le lit du bief asséché sera revégétalisé " pour conserver le souvenir de sa présence ". Les riverains pourront le franchir par des passerelles en bois. Des espèces locales (hêtre, faux acacia ou érable) seront plantées, en suivant les courbes du coteau.
Chemin de randonnée, aire de pique-nique, pontons de pêche… Le lieu-dit Les Rochers sera un trait d’union entre la ville et la campagne qui l’entourent.
Après la démolition, fin avril, suivront les travaux de terrassement et de plantation, la mise en place du mobilier urbain.
Le projet sera bouclé pour la fin de l’année.